ZVEREV, PERDANT (PRESQUE) MAGNIFIQUE

Il y a des manières d’être grand dans la défaite, et on peut considérer que, d'un point de vue purement sportif, Alexander Zverev l’a été. Dimanche, après 4h19 d’un combat décousu mais globalement intense, l’Allemand a vu Carlos Alcaraz s’écrouler sur la terre battue, comme tout bon Espagnol qui remporte Roland-Garros.

Zverev a salué son adversaire, d’une belle accolade, puis serré la main de l’arbitre, avant d’aller s’asseoir sur sa chaise. Il est resté de longues minutes, les yeux rougis, une main sur le visage, à se dire que son rêve de Grand Chelem est encore passé. Le moment est toujours difficile. L’attente, longue, avant de voir son bourreau soulever le trophée.

Réconforté par Amélie Mauresmo, venue le saluer sur sa chaise, Zverev a fait un beau discours d’après-défaite. Il a eu un petit mot pour tout le monde, pour la directrice du tournoi, pour le public, pour Alcaraz et son staff, notamment Juan Carlos Ferrero, qui a été son entraîneur. Puis l’Allemand s’est adressé à son team :  « On était proches aujourd’hui, pas assez, mais un jour, peut-être, on gagnera ce trophée », a-t-il lancé avant de donner rendez-vous au public pour l’année prochaine. « Je reviendrai », a promis le colosse.

Zverev a ensuite reçu l’hommage d’Alcaraz, élégant. « Félicitations, ‘Chascha’, a confié l’Espagnol, avec son accent très marqué. Ton niveau de jeu a été incroyable, ton niveau de combat, et je sais tout le cœur que tu mets sur le court, ce par quoi tu es passé avec cette blessure. Je suis sûr que le temps te donnera l’opportunité de gagner un Grand Chelem, et notamment ce tournoi. »

Ainsi s’est achevée la quinzaine d’Alexander Zverev, et on peut dire qu’elle a été éreintante, éprouvante et exigeante. Elle a commencé dès le tirage au sort où son 1er tour, au lieu d’être une formalité comme cela doit l’être pour une tête de série n°4, a eu le retentissement médiatique d’une finale de Grand Chelem.

C’est lui qui a affronté Rafael Nadal pour sa possible dernière apparition à Roland-Garros. Zverev avait été diablement solide ce jour-là, pour ne pas flancher face au niveau de jeu (très bon) de l’Espagnol, et pour ne pas vaciller alors que le monde entier, ou presque, souhaitait la victoire du Majorquin.

La suite ? Pas simple non plus, avec notamment ces deux matches en cinq sets, contre Tallon Griekspoor, qui a failli le pousser vers la sortie, puis contre Holger Rune, avec une fin tardive. Face à Casper Ruud, Zverev a enfin passé le cap des demi-finales de Roland-Garros, où il avait cédé trois années de suite. Entre cette qualification pour la finale, et sa victoire sur Nadal au 1er tour, Zverev effaçait le souvenir de sa grave blessure sur ce même court il y a deux ans, alors qu’il livrait un combat hallucinant face au Majorquin. Le récit du géant qui chute et se relève pour reprendre sa quête était écrit.

Un procès qui marque (aussi) sa quinzaine

L’histoire s’est transformée en celle du perdant valeureux, qui devient le premier joueur à perdre en cinq sets ses deux premières finales de Grand Chelem. Rien à voir avec la première, toutefois. A l’US Open 2020, il avait mené deux sets à zéro contre Dominic Thiem avant de se liquéfier. Cette fois, Zverev a lutté jusqu’au bout de ses forces, tributaire d’un Alcaraz maître du jeu, qui a flanché pendant le deuxième et le troisième sets, avant de reprendre la main dans les deux dernières manches.

« J’ai fait tout ce que je pouvais », a résumé Zverev, avant de revenir sur cette erreur d’arbitrage dont il a sans doute été victime. A 2-1 dans le cinquième, sur une balle de débreak, Alcaraz a été sauvé d’une double faute sur une intervention de l’arbitre. Le hawk-eye, qui n’est pas utilisé sur terre battue en raison de sa marge d’erreur, indiquait que la balle était sortie de quelques millimètres. Zverev l’a regretté, mais il n’a pas voulu s’en servir comme d’une excuse, en n’oubliant pas qu’il a encaissé un 6-1, 6-2 dans les deux derniers sets. « C’est frustrant (cette balle de débreak, ndlr), mais c’est ainsi. Il était meilleur que moi dans le quatrième et le cinquième », a-t-il reconnu.

En attendant, il est impossible de revenir sur le tournoi d’Alexander Zverev sans évoquer cette part d’ombre, et son autre actualité de la quinzaine. Son procès en appel pour violence domestique (accusé d’avoir étranglé son ancienne compagne, il avait été condamné en premier lieu à 450 000 euros d'amende), qui a débuté le 31 mai, en plein tournoi. Ce feuilleton judiciaire a pris fin vendredi dernier, jour des demi-finales.

Un accord a été trouvé avec son ancienne compagne pour mettre fin au procès, le joueur devant tout de même verser 200 000 euros aux autorités (et probablement une autre somme à la mère de son enfant). Cette décision ne le rend pas coupable, donc Zverev estime qu’elle l’innocente. C’est ce qu’il a martelé vendredi soir face aux journalistes, avec une certaine morgue. La réalité, toujours délicate à cerner dans ce genre d’affaires, semble nettement plus trouble. Et on ne va pas le cacher : voir Zverev acclamé pour sa victoire à Roland-Garros, deux jours après cet épisode, aurait suscité un certain malaise.

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